Alors que les entreprises cherchent à surmonter les obstacles, le défi de l’engagement des collaborateurs émerge comme une réponse potentielle, soulignant l’impératif d’une transformation managériale profonde pour garantir la compétitivité et la pérennité des organisations.
Des méthodes de management à la peine, pour créer de la croissance !
Bruno Bortolotti, dans son livre Le Management Positif (1), envisage trois grandes périodes de management contemporain.
Dans les années 80, un management « golden boy « des patrons au charisme extraordinaire, qui n’a pas en mémoire Bernard Tapie, Norbert Dentressangle entre autres. Managers qui pouvaient emmener leurs troupes grâce à leur personnalité, à leur vision, management au final très paternaliste et qui frise parfois la manipulation.
1990, voit l’avènement du manager « marketeur ». C’est la guerre, nous parlons alors de cible, de segmentation, de marchés à conquérir. Le métier commercial devient enfin un métier intelligent grâce au marketing. On connaît tout du client et de ses envies. Il n’y a plus qu’à suivre le « dieu marketing » et les affaires suivront. C’est l’époque du client « roi».
Les collaborateurs, qui fabriquent le produit, sont une quantité négligeable.
Le modèle a bien fonctionné mais tout a une fin et le modèle s’essouffle. Les clients se méfient, ils ne sont plus aussi influençables..
Année 2000, un troisième type de management lui succède. C’est le management financier, les fonds de pension arrivent, il faut servir du rendement, les tableaux Excel, les ratios financiers servent alors de management. Les managers sont nommés avec des feuilles de route simples. Nous voulons 15 % de retour sur investissement, débrouillez-vous!
La richesse humaine de l’entreprise n’est plus qu’une donnée comme une autre. On rationalise, on ferme des entreprises, on licencie… l’important c’est le rendement !
Cela a bien fonctionné et de belles réussites entrepreneuriales en sont le témoignage.
Entreprise, une croissance atone, des marges faibles…
Depuis quelques années, les entreprises ont épuisé les moyens de créer de la marge.
De nouvelles contraintes ont arrivées. Elles sont :
Techniques.
Technologiques.
Juridiques.
Écologiques.
Sociales.
Elles ont aussi épuisées les méthodes classiques de création de valeur, à savoir :
Tirer les salaires vers le bas.
Réduire le coût des intrants et par conséquent la qualité des produits qu’elles vendent.
La gestion financière est à l’os.
Le marketing à tout crin s’essouffle, le client s’en méfie, n’est plus aussi naïf.
Richesse humaine, les collaborateurs créateurs de valeur pour l’entreprise ont été oubliés !
La richesse humaine, les collaborateurs des entreprises. pour autant cela fait quelques années que nous assistons à un désengagement de ces mêmes collaborateurs.
Le manager doit faire face à la quadrature du cercle :
Il n’a pas ou peu d’innovation à proposer.
Les contraintes juridiques, sociales, environnementales sont prégnantes.
Il n’a pas de budget pour augmenter le marketing, qui de toute façon ne donne plus les rendements espérés.
Les salaires sont au ras des pâquerettes ou contraints au maximum.
Il a du mal à recruter ou simplement remplacer les collaborateurs qui démissionnent.
Les équipes en place, ne font que le minimum et refusent toutes heures supplémentaires et s’en vont à 17 heures.
Et pourtant, il doit créer de la valeur. C’est l’essence même d’une entreprise.
Le retour de bâton de 50 années de management commence à se manifester
Nous pouvons aujourd’hui diviser les collaborateurs en trois groupes.
Les collaborateurs démobilisés, ou non engagés (le quiet quitting).
Les collaborateurs neutres.
Les supers-collaborateurs : des collaborateurs pleinement engagés. (2)
La première catégorie 37% des salariés font du quiet quitting et ne font que ce qui est stipulé dans leur fiche de poste. (1)
La troisième catégorie représenterait quant à elle, 6% des collaborateurs comme ayant un engagement positif. (2)
Ce qui nous donne mécaniquement 63 % pour la deuxième catégorie de collaborateurs :
Ceux qui font simplement leur travail, mais qui vont plus s’attacher aux dysfonctionnements qu’aux aspects positifs de leur travail. Ils ne prendront aucune initiatives afin d’améliorer les processus, la production, etc.
Un autre chiffre édifiant : seuls 21 % des collaborateurs feraient confiance à leurs dirigeants !
Dans cette même enquête, 93% des collaborateurs estiment très importante, un leadership authentique et une communication honnête. (2)
Devons nous être étonnés de ces mauvais scores?
Un dicton ne dit-il pas « qui sème le vent récolte la tempête » ?
L’engagement des collaborateurs, une réponse à la profitabilité des entreprises ?
Une étude gallup (3), calcule l’impact de l’engagement grâce auquel :
L’efficacité opérationnelle augmenterait de 40 %.
Le turnover diminuerait de 24 %.
Les collaborateurs fortement engagés auraient une productivité supérieure de 17 %.
La profitabilité des entreprises serait 21 % supérieure.
Autre fait marquant, le retour sur salaire d’un salarié activement engagé serait de 120 % c’est-à-dire que pour un euro investi en salaire le retour est de 1.2 euro. En revanche un salarié désengagé aurait un retour sur salaire de 60% soit 0.60 euro, l’entreprise perd 0.40 euro ! (4)
La course à l’engagement comme source de croissance est lancée, mais sera-t-elle aussi aisée, et honnête que l’on veut nous le faire croire ?
Suffit-il à l’instar du greenwashing de faire du benevolens washing ?
Aujourd’hui quelle entreprise ne parle pas de bienveillance, de valeurs, d’éthique j’en passe et des meilleures. Elles en font même du marketing ! Nous en parlons dans l’article sur le feel good management.
Panique à bord les caves se rebiffent !
Qu’est-ce qu’un cave, en argot c’est une personne qui n’est pas du milieu, et que l’on peut duper facilement, mais dans le film de Gilles Grangier (Le cave se rebiffe – 1961), on pourrait dire a cave , cave et demi, car à la fin c’est le cave qui gagne, et qui part avec la fausse mornifle.
Cela ripoline sévère au pays de l’entreprise.
Une pincée de RSE, de QVT, d’écologie, d’inclusion, d’accompagnement, de PIP, de PAP(5)…
Pouvaient-elles faire autrement ?
Quand la justice condamne maintenant les managers. En 2019, au procès France Telecom les managers de l’époque ont été condamnés.
Que les gens normaux que nous sommes, peuvent grâce aux réseaux sociaux boycotter une marque qui ne répondrait pas où plus à nos convictions … Budweiser avec son partenariat avec l’actrice transgenre Dylan Mulvaney a perdu 5 milliards $ en bourse . Que l’on soit bien clair, je ne me positionne en rien sur la validité ou pas de ce partenariat, chacun est libre d’en penser ce qu’il veut.
Dénoncer les cas de harcèlement, moral, sexuel qui avant restaient bien sagement à l’intérieur de l’entreprise.
Que depuis 2008, a été transposé en droit français la directive européenne de 2004 imposant aux entreprises d’agir sur les causes su stress dans l’organisation du travail.
Alerte danger, les profits diminuent… Changeons tout, pour que rien ne change.
Introduisons les notions de coopération, de comportement….mais notons les :
Tu n’es pas assez coopérant. Viré !
Tu n’es pas assez assertif. Viré !
Tu n’es pas assez bienveillant. Viré !
Tu ne sais pas montrer tes émotions. Viré !
Tu n’es pas assez engagé, viré, quitte à imaginer ce non engagement (8) au travers du ranking des salariés. Malheur à ceux qui obtiennent de mauvaises notes !
La liste est longue vous avez compris
Avec une adaptation extraordinaire, les entreprises se sont appropriées les obligations légales, sociétales, pour en faire des items de management et continuer à faire de la gestion des ressources humaines, une variable d’ajustement sous couvert de bienveillance.
Devinez quoi ?
Cela ne change rien au désengagement des collaborateurs. Le taux d’engagement ne cesse de baisser.
Quelle définition donner à l’engagement du collaborateur ?
Pour parler d’engagement, il faut nous mettre d’accord sur une définition.
Être engagé, c’est :
Trouver un sens à son travail.
Se sentir bien et épanoui dans son entreprise.
Aider naturellement cette dernière à atteindre ses objectifs.
Mais aussi, et c’est très important :
Un alignement des convictions personnelles et des valeurs de l’entreprise.
Avoir la conviction de contribuer à la réussite d’une aventure collective.
Dans les faits, un collaborateur engagé :
N’aura pas peur de prendre des initiatives.
Ira au-delà de sa mission, s’il estime que c’est dans l’intérêt de son organisation.
Aura un investissement librement consenti plus fort.
Sera un ambassadeur de son entreprise, sur le climat, ses valeurs, ses produits.
Sera plus fidèle à son entreprise.
L’engagement des collaborateurs est donc un levier de compétitivité pour l’entreprise.
Les moyens pour augmenter l’engagement de collaborateurs.
Nous avons défini ce qu’était l’engagement, mais quels sont les leviers à actionner, afin d’augmenter ce dernier.
Dans l’étude Gallup (3),
44 % des sondés estiment cette reconnaissance insatisfaisante en l’état, alors qu’ils sont 94 % pensent qu’elle est importante pour favoriser leur engagement dans l’entreprise.
Aussi le principal levier sera la reconnaissance des collaborateurs, qui englobe l’écoute et la prise en compte de leurs besoins :
Condition de travail.
Reconnaissance.
Management, clair et transparent, équitable, dans lequel ils peuvent avoir confiance et dont ils reconnaissent les compétences.
De l’autonomie, le micromanagement est source de désengagement.
Alignement des valeurs de l’entreprise avec leurs convictions personnelles.
La contribution a une aventure collective.
Favoriser le développement personnel.
Accompagner les montées en compétence.
Favoriser l’évolution professionnelle.
Une culture d’entreprise.
Ce besoins sont des points d’amélioration majeurs pour renforcer leur engagement, bien que cette liste ne soit pas exhaustive.
Par ailleurs, toutes les études sur la notion d’engagement montrent que le salaire n’est pas un levier permettant d’augmenter l’engagement. Il générera simplement de la satisfaction, ce qui n’est pas la même chose.
Les leviers sont multiples et ne seront pas les mêmes selon l’entreprise. La grande entreprise, la start-up, la PME, la TPE..
L’entreprise devra donc mener l’enquête pour être au plus près des besoins de ses collaborateurs.
Cette enquête se fera autour de 4 thèmes :
Le management.
Le travail.
La gestion des ressources humaines.
L’entreprise.
Les managers en première ligne pour changer la donne.
Pour changer la donne, les managers apparaissent comme un levier essentiel.
« Ils peuvent aider les salariés à trouver du sens à leurs actions »
dit Bernard Coulaty, ancien DRH de Pernod-Ricard.
La 10 eme méta analyse de Gallup de 2020 sur l’engagement de salariés annonce que les managers contribuent pour 70% de l’engagement des collaborateurs. (7)
Et pourtant le poste de manager est en déficit d’image !
Seulement 21 % des collaborateurs font confiance à leurs dirigeants (8). Nous en avons vu les raisons plus haut.
Non seulement, on ne leur fait pas confiance, mais il y a une crise des vocations.
Selon une étude Cegos de 2018 (9), 66% des salariés ne souhaitent pas devenir managers.
Les managers associés au mal être au travail.
Pire , le management est dramatiquement associé à la souffrance au travail, ou tout au moins une relation forte est établie entre les deux.
Selon une enquête Cegos menée en 2017, environ deux tiers des employés estiment que le principal facteur de leur malaise au travail réside dans la pression exercée par leur hiérarchie, aggravée par le manque de soutien de leurs supérieurs (11).
D’après le rapport de la DARES de 2018 (12), environ un tiers des travailleurs font face à des dilemmes éthiques, à des obstacles professionnels et à une précarité socio-économique.
Parler d’éthique conforte la nécessité d’avoir des valeurs d’entreprise, une culture d’entreprise, alignée avec les convictions des collaborateurs.
J’aborde régulièrement ces sujets dans mes posts ou sur mon blog.
Le prochain article abordera le sujet clôturera cette série deux articles avec
Inventer une nouvelle façon de manager.
Il faut être enthousiaste de son métier pour y exceller.
Diderot
Franck Lidar
J’accompagne les chefs d’entreprise qui ont des valeurs fortes et qui veulent les faire perdurer dans leur entreprise.
Vous voulez transformer vos valeurs en outils de management, mais vous ne savez pas par où commencer ?
Je suis là pour vous accompagner.
Parlons en !
(1) Le management positif – Bruno Bortolotti B2 edition
(2) Censuswide a interrogé 9 042 employés (âgés de plus de 22 ans) de France (3000), des États-Unis et du Royaume-Uni entre le 21.10.2022 et le 15.11.2022
(3) 2021 selon le rapport « State of the Global Workplace » de Gallup.
(4) Determining Employee Return on Investment, Human Capital Institute, 2010.
(5) Performance improvment Plan ou Plan d’amélioration de la performance apparu en 2010, présenté comme des coaching et des formations
(6) 2022 https://www.gallup.com/workplace/349484/state-of-the-global-workplace.aspx
(7) https://www.gallup.com/workplace/321725/gallup-q12-meta-analysis-report.aspx
(8) Le management totalitaire Violaine Vourieres Albin Michel 2023
(9) Radioscopie des managers (cegos.fr)
(10) « Etude Ifop pour les Makers réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 11 au 13 octobre 2022 auprès d’un échantillon de 2015 personnes, représentatif de la population masculine âgée de 18 ans et plus »
(11) https://www.capital.fr/votre-carriere/managers-allegez-la-charge-mentale-de-votre-equipe-1341077
(12) Documents d’études – Dares – 2018 – Travail et bien-être psychologique – L’apport de l’enquête CT-RPS 2016